Avec Eds du Pr Ouegnin et l’Urd de Mme Danièle Bony, vous invitez tout le peuple à un meeting ce samedi 17 mars 2018 à la place CP1 à Yopougon. Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Quel message allez-vous passer ?
Je vous remercie d’ouvrir vos colonnes au Mfa et à moi-même. Effectivement , il y a quelques jours, dans le cadre des échanges à l’intérieur du partenariat que l’Urd et le Mfa ont récemment conclu avec Eds du Pr Ouégnin, nous avons décidé de changer de registre et de démarrer une mobilisation générale pour signifier au Chef de l’Etat , Alassane Ouattara, que l’on ne peut pas et ne doit pas organiser d’élections en Côte d’Ivoire tant que toute la structure, le système et ses responsables n’auront pas été revus dans le sens d’un plus grand équilibre entre le pouvoir exécutif et les autres composantes de la scène publique que sont les partis politiques de l’opposition la Société Civile.
Il faut comprendre qu’il y a surtout, et en urgence, la nécessité de convoquer toutes les parties prenantes pour une reprise des discussions et négociations au point où les avaient conduites la National Democratic Institute (NDI).
Car, et c’est là qu’il y a souvent mauvaise foi du côté du pouvoir, le NDI n’a pas conclu à une fin de sa mission mais au contraire à une invitation faite à toutes les parties de continuer à échanger et travailler, pour toujours approcher le plus possible le point du consensus. Nous n’y sommes pas arrivés et le gouvernement a arrêté unilatéralement le processus en posant avec mauvaise foi ‘’que tout est accompli“ et que tout le monde a participé aux travaux donc a approuvé !
Mais qu’en est-il de l’arrêt d’une cour internationale de Tanzanie dont on parle sans arrêt depuis peu ?
Le second point en faveur d’un refus total d’aller à des élections ou à les reconnaitre réside dans l’intervention de la Cour africaine des Droits de l’Homme et des peuples, siégeant à Arusha, en Tanzanie. Cette Cour relevant de l’Union africaine et aux décisions faisant autorité et s’imposant aux lois nationales, a été saisie par une Ong, l’Apdh, quant à la compatibilité de la composition des organes directeurs et des pouvoirs de la Commission électorale indépendante (Cei) avec les normes ou règles admises a minima, aujourd’hui , pour organiser et conduire des élections dans tout pays qui se veut moderne et démocratique.
Cette juridiction supranationale a rendu un arrêt, faisant injonction à l’Etat de Côte d’Ivoire, de repenser totalement son système d’organisation des élections, tant l’existant, à savoir la Cei, est antidémocratique parce que trop favorable au pouvoir exécutif, et donc potentiellement confligène au plus haut degré.
Le Gouvernement ivoirien a usé de toutes ses voies de recours, mais en vain. Et c’est donc depuis novembre 2017 qu’il aurait déjà dû proposer sa nouvelle mouture d’un projet de système électoral, plus en adéquation avec ce qui se fait de nos jours.
Tous les partis politiques (pouvoir comme opposition), toute la société Civile et tous les partenaires au développement étaient dans cette attente lorsque, à la surprise générale, le conseil des Ministres a annoncé la tenue d’élections Sénatoriales pour le 24 mars 2018 !
Cette annonce relève des dictatures les plus hermétiques d’il y a 3 à 5 décennies. Tant il y a, à tous les niveaux, piétinement de la constitution et des libertés fondamentales, et mépris pour le peuple, cette arrogance valant défi et provocation ouverte à l’opposition, à la société civile et à tous les démocrates !
Donc, étant donné que le retour aux nombreux appels des partis politiques et de la Société civile pour une reprise des échanges et concertations sur le sujet de la Cei avant toute élection ne vient toujours pas, tant Alassane Ouattara est sûr de lui-même et aveuglé par son orgueil, les trois partis que sont l’Eds, l’Urd et le Mfa ont décidé de préparer Alassane Ouattara à entendre la seule grande voix qui passe au-dessus de toutes les autres, la « VOX POPULI », celle du peuple qui est souverain et doit toujours trancher en dernier ressort ! Nous allons donc, dès ce samedi 17 mars, commencer, avec tous les autres partis politiques de l’opposition et la Société Civile, mettre en marche le train de la volonté du peuple et du respect et de la considération qui lui sont dus. Lorsque ce train VOX POPULI est bien mis sur ses rails et a quitté sa gare, sa destination finale est la station ‘’VOX DEI’’, et rien ne peut l’arrêter en route ; que ceux qui veulent bien entendre entendent !
Ne craignez-vous pas que cela puisse passer pour un appel à la révolte ou à l’insurrection populaire ?
Pas du tout , et bien au contraire, c’est un appel au pouvoir Ouattara à se ressaisir , à annuler les élections et son projet de Senat en sa forme actuelle, et à engager des discussions de fond sur, non seulement la Commission électorale (Cei) , mais sur toute la situation de la Côte d’Ivoire en 2018 ; entre autres le calvaire que continuent d’endurer ses populations, misère qui va en s’aggravant, en contradiction avec tous les discours et toutes les manifestations d’autocélébration servis à la télévision nationale à longueur de journée.
Est-ce que Alassane Ouattara, son premier ministre et son ministre de la Communication ont une idée du pourcentage de foyers ivoiriens où l’on ne suit même plus le journal télévisé tellement l’on est déçu et révolté ? Je me le demande. Ne revenons pas sur l’égrenage des maux au quotidien des Ivoiriens (école, coût de la vie, transport, tout déficit d’emplois, prix d’achat réel des produits de vente café- cacao – coton – anacarde etc.)
Le grand divorce aujourd’hui entre Ouattara et les Ivoiriens est que ces derniers ne croient plus en lui, n’attendent plus rien de lui et ne lui demandent presque plus rien, mais de grâce, qu’il les respecte et arrête de les mépriser ! Cela rend tout individu et tout peuple incontrôlable puis ingérable !
Il nous est parvenu que dans le cadre de la même lutte, le Mfa aurait lancé un appel aux candidats aux sénatoriales !
Effectivement, sous l’autorité du Mfa, j’ai adressé une lettre ouverte à tous les candidats aux élections sénatoriales, en reprenant tout ce que nous avons évoqué au début de cet entretien ; je leur ai aussi signalé que notre constitution confie au Parlement le soin de légiférer sur la mise en place de cette deuxième chambre, et qu’il n’appartient pas au chef de l’Etat de le faire, et surtout par voie d’ordonnance, ce qui confirme qu’on a voulu contourner ou écarter les députés qui pourtant sont les représentants du peuple.
Lorsque l’on sait que le collège électoral (conseillers municipaux et régionaux) s’est constitué lors d’élections où l’opposition n’a presque pas pris part, il est évident que la majorité des sénateurs, qui seront élus sans risque ni péril sur la liste Rhdp (Pdci-Rdr), devront avoir le triomphe vraiment modeste.
Surtout qu’avec un tiers des sénateurs nommés par le Président de la République, l’on est en droit de se demander qu’est-ce que diantre cette nouvelle assemblée peut apporter à la Côte d’Ivoire souffrante d’aujourd’hui.
Vraiment, il faut arrêter la mascarade et annuler purement et simplement cette consultation !
Pouvons-nous déjà avoir une idée de la suite des actions de votre collectif ?
Comme on le dit souvent, l’appétit vient en mangeant, et ce samedi 17 mars, c’est d’abord une cérémonie de retrouvailles entre le peuple de Cote d’Ivoire et les organisations politiques, de la société civile qui, dans les plus grandes difficultés, continuent de militer et se battre pour la défense de ses droits premiers et de sa dignité.
Nous évoquerons le grand problème de la réconciliation, de la libération des prisonniers politiques, du retour des milliers d’exilés et du cas particulier des Ivoiriens à La Haye.
Nous allons maintenir la flamme de la bonne information et de la mobilisation du peuple dans la foi et la confiance en sa victoire finale inéluctable !
Interview réalisée par Y. A