Deux lieux, même constat. Maison du parti à Cocody, place Ficgayo, à Yopougon. Les observateurs les plus sérieux sont unanimes à dire que le PDCI de Aimé Henri Konan Bédié et son allié le PPA-CI de Laurent Gbagbo ont fait une démonstration de force, en mobilisant des centaines de milliers de leurs militants pour les deux rendez-vous : le 7e congrès extraordinaire pour le PDCI et la fête de la renaissance pour le PPA-CI. Ce constat se détache des lentilles du RHDP qui tourne en dérision cette mobilisation. Le parti présidentiel est à fond dans la politique politicienne. Hélas les faits sont têtus. On peut aujourd’hui affirmer sans ambages que la majorité sociologique se trouve du côté des alliés, PDCI et PPA-CI. Le parti au pouvoir peut à son tour revendiquer cette majorité sociologique. Et c’est de bonne guerre. En démocratie, c’est la loi du grand nombre. Le RHDP étant au pouvoir, on peut de facto dire que le parti présidentiel dispose de la majorité sociologique. Sauf que les élections sous Ouattara ne peuvent être frappées du sceau de la démocratie. Car les institutions impliquées dans l’organisation des élections, notamment la CEI et le Conseil constitutionnel et autre cour suprême donnent d’elles, l’image d’institutions aux ordres. Nous en voulons pour preuve, le verdict dans le contentieux des législatives à Yamoussoukro. Pas convaincu du verdict, le candidat du PDCI, KKP a porté l’affaire devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, basée à Arusha, en Tanzanie. Cette Cour a donné raison à KKP, le candidat PDCI. Or ici, c’est le ministre Diarrassouba qui a été déclaré vainqueur par le Conseil constitutionnel. On peut multiplier les exemples à foison. Celui de Grand-Bassam pour la mairie entre le PDCI et le parti au pouvoir mérite notre attention. Minoritaire, le RHDP a, chaque fois, eu recours au service des loubards qui s’emparent des urnes pour fausser le verdict des urnes. Le candidat du PDCI, Ezaley a battu le candidat du pouvoir dans les urnes, mais c’est le candidat du pouvoir qui a fini par avoir le fauteuil municipal. La chambre administrative de la Cour suprême qui devait trancher a fini par évoquer la paix sociale comme argument pour donner la victoire au candidat du RHDP. Le droit a donc été sacrifié sur l’autel de la politique. Parce que si la paix sociale était troublée dans la cité balnéaire, c’était le fait des militants du parti au pouvoir, aidés de loubards, qui organisaient la chienlit. De l’un à l’autre, la majorité que revendique le RHDP, par exemple au parlement est le fruit de plusieurs fraudes et autres passages en force. Au vrai, le pays est gouverné par une minorité qui soumet le peuple par la violence. Même l’élection suprême de 2020 a été remportée en tordant le cou à la Constitution. Là encore c’était une victoire à la Pyrrhus. Des ONG de droits de l’homme comme Amnesty International ont tout documenté. « Selon les chiffres officiels, 85 personnes avaient été tuées et des centaines avaient été blessées lors de manifestations et d’affrontements entre sympathisantes du parti au pouvoir et de l’opposition en 2020 », écrit l’ONG dans son rapport de 2022 sur la Côte d’Ivoire. Le moins que l’on puisse dire c’est que la majorité politique du RHDP est frauduleuse sur toute la ligne. Le parti s’est taillé des sièges dans le septentrion du pays au moyen d’un découpage scandaleux. Avant même que les élections ne commencent, le parti engrangent des postes électifs dans le Nord où ses adversaires sont interdits de façon subtile, d’entretenir ce qu’il existe comme militants. Résultats : de plus en plus de partis d’opposition ne présentent pas de candidats dans le Nord, faute de cadres à présenter. Même le parti septuagénaire qui disposait encore des racines dans la région, a jeté l’éponge. Les élections nationales se transforment en élections familiales au Nord. Si le parti unique a connu sa fin dans les années 1990, il continue de survivre dans le Nord du pays par la faute d’hommes politiques qui sont prêts à tout pour parvenir à leurs fins. Ils surfent sur le dangereux réflexe identitaire, tribal pour faire adhérer les populations à leurs causes politiques. La terrible phrase « on ne veut pas que je sois candidat, parce que musulman et du nord », a vécu. Bien avant elle, la fameuse charte du Nord a dessiné les contours d’une autarcie pensée et promue par des cadres à manque de publicité. Pour autant, faut-il se résigner devant ce jeu dangereux du pouvoir RHDP ? assurément pas. La Côte d’Ivoire est une et indivisible ne doit pas seulement être un slogan creux. C’est pourquoi nous plaidons auprès des partis d’opposition, en tout cas les plus significatifs, de continuer à s’implanter au Nord, malgré les dangers auxquels ils sont confrontés. Ce sera leur part de sacrifice pour ne pas perdre le Nord. Ne rien faire pour arrêter le pouvoir RHDP dans sa course folle vers l’implosion de l’unité nationale, c’est se rendre coupable de non-assistance à un pays en danger. Autre action à court terme pour le PDCI et le PPA-CI, c’est de déboulonner le régime RHDP pour mettre fin à sa politique sectaire qui menace l’unité du pays. Ces partis cités sont face à une responsabilité historique. Tergiverser comme ils le font actuellement est suicidaire. Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo ont une responsabilité plus grande. Les dérives totalitaires qu’ils ne cessent de dénoncer ne prendront fin que s’ils « dégagent » ce pouvoir, bien sûr, par les urnes. Il faut pour ce faire une alliance forte. Sociologiquement, numériquement, le PDCI et le PPA-CI constituent la majorité. Cette majorité sociologique doit être trans formée en majorité politique. Et c’est possible. Ils savent ce qu’il reste à faire. Qu’ils ne laissent pas leur entourage les induire en erreur. Seule une alliance PDCI-PPA-CI peut mettre fin au régime RHDP. Aller en rangs dispersés, c’est à coup sûr, légitimer un éventuel hold-up de ce régime.
Tché Bi Tché