Huit jours de deuil national, le moins que l’on puisse dire c’est qu’un hommage quasi- présidentiel a été rendu à l’ancien premier ministre Hamed Bakayoko. Des posters géants ont inondé la ville d’Abidjan. Un hommage national lui a été rendu au palais de la présidence, en présence de chefs d’Etat étrangers. La société civile, des artistes venus d’horizons divers, les partis politiques ont loué ses qualités de rassembleur au stade d’Ebimpe plein comme un œuf. On ne pourra pas dire que le pouvoir Ouattara a boycotté les obsèques de son premier ministre. Bien au contraire. Mais si on gratte le vernis, on peut dire que cela n’est pas suffisant. En effet grâce à sa posture médiane, Hamed Bakayoko a réussi à faire participer l’opposition aux élections législatives du 6 mars 2021. Rien n’était gagné par avance, si l’on regarde la paralysie du pays lors de la présidentielle du 31 octobre 2020. Le fossé entre le pouvoir et l’opposition était tellement grand que l’opposition réunie autour de Aimé Henri Konan Bédié, ancien président de la république, avait lancé un mot d’ordre de désobéissance civile qui, il faut le reconnaitre, avait paralysé le pays. Le boycott de cette élection en lien avec le rejet du 3e mandat d’Alassane Ouattara avait crispé l’atmosphère politique. Après sa participation aux législatives du 6 mars, l’opposition dans son entièreté a pris sa part de deuil à toutes les étapes des obsèques d’Hamed Bakayoko. Créant une union sacrée de la nation endeuillée. Si la nation a pu se réconcilier à la faveur du décès du premier ministre, le pouvoir Ouattara doit saisir au bond cette opportunité pour donner un coup de fouet à la réconciliation nationale qui, il faut le dire, est sur cale depuis l’avènement de Ouattara au pouvoir. La sagesse africaine enseigne que les vivants ferment les yeux aux morts et que les morts ouvrent les yeux des vivants. Ouattara rendrait un bel hommage à Hamed Bakayoko, s’il transformait l’essai de l’union sacrée autour de sa dépouille mortelle en un tremplin pour apaiser définitivement le pays, en libérant les prisonniers politiques, civils et militaires, en faisant rentrer d’exil tous ceux qui errent encore dans la sous-région depuis la crise post-électorale de 2010, à leur tête Laurent Gbagbo et Charles blé Goudé. C’est encore possible de transformer le poison de cette disparition brutale en élixir de la réconciliation nationale.
Par Tché Bi Tché