En cette saison de pluies dans le grand ouest de la Côte d’Ivoire, ce Vendredi le 11 octobre 2024, le temps est clément dans la ville de Danané, localité ivoirienne dans la région du Tonkpi, à cheval sur deux Etats voisins, à savoir la Guinée Conakry et le Libéria. Déjà très tôt le matin, l’équipe de reportage pour le compte de lessentinelles.info est en route pour Kédéré, un village du département de Danané, perdu dans les confins de la forêt. Avec le bon état de la route couverte de bitume, à peine une quinzaine de minutes ont suffi pour rallier le faubourg. Sur place, le chef du village et ses sujets attendaient. Après les civilités, nous voilà sur le site dédié à l’Ecole Primaire Publique de Kédéré. L’établissement scolaire s’étend sur une superficie d’un peu plus d’un hectare, situe le président du Comité de Gestion Scolaire ou COGES, Kapeube Sylvain.
Des constructions de fortune
Fait ahurissant, ce sont des constructions de fortune qui accueillent les apprenants. Soutenues par de simples bois qui servent de piliers, les salles de classe sont partiellement faite de brique en terre. Quelques brindilles en constituent la charpente, couverte de plastique noir sur lequel sont répandues des feuilles de palmier. Tout est précaire. A en croire une Maitresse, alors qu’elle expliquait une leçon, elle a entendu des craquements. Tout à coup, un des quatre murs a commencé à se pencher, entrainant dans sa chute toute la salle de classe. « Par reflexe, j’ai eu le temps de soutenir le côté en défaillance avant de sommer les élèves de sortir. Leurs cris ont alerté des personnes qui, sans tarder, sont venues à la rescousse. Plus de peur que de mal, même s’il n’y a pas eu de dégâts humains, la salle de classe s’est effondrée. », raconte celle qui s’occupe des Cours élémentaires. Des riverains, pour la circonstance, se sont improvisés en menuisiers, s’activant à mettre en usage un table-banc et un tableau. Le « bâtiment » des Cours Moyens 1 et 2 est en ruine. Assurément, un pan de l’édifice s’est écroulé, visiblement sous l’effet des fortes pluies qui s’abattent dans la localité. Dans cette classe qui combine à la fois les CM1 et CM2, faute de salle, dit-on, le directeur de l’EPP KEDERE, Ebiny Koffi Mathieu, est à la tâche. Il dispense les cours. Interrogé, le premier responsable de l’établissement scolaire d’Etat explique les difficultés que le personnel enseignant rencontre.
Hommages au personnel enseignant de l’EPP KEDERE
« Nous sommes en mission pour le compte de l’Etat de Côte d’Ivoire malgré les conditions très difficiles de travail »
Vraiment une mission ! Officiant sous des paillotes qui tiennent à peine en équilibre, au risque de s’écrouler à tout moment, le directeur de l’EPP KEDERE et ses deux collègues dames, ne jettent pas pour si peu la craie. Ils sont à leur poste A contrario, comme ils le disent, des enseignants affectés à l’EPP KEDERE, ne supportant pas le cadre de travail, ont renoncé à leur devoir. Parmi les inconforts, citent les maitresses, le manque de latrines à l’école, le défaut de salles de classe force à la pratique de la double vacation. Ceci dit, pendant que certains suivent les cours, d’autres attendent leur tour. Toujours, à les entendre, sans logements décents, elles sont obligées de vivre en ville et de parcourir 22 kilomètres en aller et retour, les jours ouvrables, de leur lieu de résidence à leur poste de travail. A midi, poursuivent-elles, « nous restons sur place, chacune dans son bureau, après le départ des élèves ». Pour se reposer avant la reprise, les deux dames, ainsi parlent-elles, s’étendent par terre sur des planches.
Dans cette grisaille, quelques performances de l’EPP KEDERE
Au dire du directeur, sur 18 candidats présentés au Certificat d’Etudes Primaires Elémentaires, CEPE, l’an dernier, 14 ont été déclarés admis totalisant un taux de réussite de 77,77 %. Animé de beaucoup d’espoir pour un avenir meilleur de l’établissement public qu’il dirige si les conditions minimums d’étude sont réunies, le directeur de l’Ecole Primaire Publique du village KEDERE, Ebiny Koffi Mathieu, plaide pour la construction de salles de classe et de commodités qui vont avec.
Plaidoyer pour la construction de l’EPP KEDERE
Il y a beaucoup d’intérêts à doter KEDERE d’infrastructures scolaires adéquates. Sa proximité avec la grande voie qui relie les villes principales de la zone lui offre un avantage certain d’accès facile. Ainsi, des enfants en âge d’aller à l’école qui sont dans les contrées lointaines, dans les campements ou villages environnants peuvent venir s’y former. En atteste le président du COGES de l’EPP KEDERE, Kapeube Sylvain, « dans les zones reculées, s’y trouvent des enfants à scolariser, des filles et des garçons. Cependant, faute d’école, ceux-ci sont laissés pour compte, réduits à des travaux champêtres ou en proie à des grossesses précoces pour les filles, s’ils ne viennent grossir le lot des illettrés et des analphabètes. C’est pourquoi, conscients de l’importance de l’éducation scolaire, les habitants du village de KEDERE, en appellent aux bonnes volontés, Organisations Non Gouvernementales, Fondations, Clubs, etc. à les appuyer dans leur initiative. Avec les moyens de bord dont ils disposent, ils ont érigé des hangars pour abriter leurs enfants écoliers. Avec l’apport des donateurs, ils espèrent à un lendemain meilleur, voir le village KEDERE doté d’une école avec des infrastructures modernes.
Tché Bi Tché
Envoyé spécial à Danané
Encadré
Le Chef du village KEDERE, Zon Gommun Bernard, a bien voulu se prononcer sur l’état de l’établissement primaire du même village.
Présentez-vous à nos lecteurs
Je suis Zon Gommun Bernard, chef du village Kédéré.
Historique et raison de la création de l’Ecole Primaire Publique Kédéré
L’EPP KEDERE a été fondée en 2011 par la volonté des villageois qui voulaient scolariser leurs enfants. En effet, les enfants en âge d’aller à l’école n’avaient pas de lieu ou aller vu que le village ne disposait pas d’établissement scolaire primaire. Ceux d’à côté sont éloignés et on ne peut pas laisser les tout-petits s’aventurer en brousse pour rejoindre leur école. C’est comme cela que l’idée de fonder une école sur place est née. En 2012, l’Etat y affecte des enseignants. Cependant, ils sont nombreux à renoncer à leur poste car disent-ils le cadre de travail ne leur sied pas. Actuellement, un maitre qui fait office de directeur et deux dames animent l’EPP KEDERE. Il faut saluer leur courage.
L’état des lieux de l’EPP KEDERE
Le village a construit l’école avec ses moyens de bord et le matériau trouvé sur place. Ceci dit, les constructions ont été réalisées avec la boue. Evidemment, elles ne peuvent tenir longtemps. En cas de fortes pluies ou des intempéries, les édifices s’écroulent. Nous reconnaissons que l’école manque de latrines et de logements des maitres. D’ailleurs, il n’y a pas que ces commodités qui font défaut. Il n’y a pas suffisamment de salles de classe également. Ce qui pousse à la pratique de la double vacation avec seulement un effectif de 130 élèves.
Des doléances
Kédéré a fait le premier pas. Toutefois, les besoins restent encore énormes. C’est pourquoi, le village en appelle aux bonnes volontés d’apporter leurs contributions pour hisser EPP KEDERE au rang d’école moderne.
Entretien réalisé par TBT