Pour tout observateur attentif du profil politique d’Alassane Ouattara, tous les doutes raisonnables sont permis sur sa capacité à diriger la Côte d’Ivoire par la voie démocratique. La détention prolongée sans jugement de prisonniers politiques, le gel d’avoir d’opposants, interdiction de meeting de partis de l’opposition, l’impunité dont bénéficient les membres de son clan en sont des illustrations. Malgré ce déni de démocratie, il veut toujours se maintenir au pouvoir le plus longtemps possible. Pour y parvenir, il a fait voter une nouvelle constitution qui lui permet de briguer un troisième mandat, créer un sénat dont il pourra nommer un tiers des membres. Cette institution sera un contre-pouvoir du parlement dont l’actuel président, Guillaume Soro, ne cache plus sa volonté de participer à la présidentielle de 2020. Le 24 mars prochain, les Ivoiriens se rendront aux urnes pour élire deux tiers des membres du sénat. Une élection à laquelle toutes les formations politiques peuvent participer, y compris le Rdr, parti au pouvoir. Alassane Ouattara est donc sûr d’avoir une majorité écrasante au sein de cette nouvelle institution. Mais ce projet sénatorial en réalité vise à décapiter, avec toutes les apparences démocratiques, toute opposition. Celle-ci qui n’est pas dupe des intentions du chef de l’Etat, traine les pas car avec Youssouf Bakayoko à la tête de la Commission électorale indépendante(Cei), beaucoup d’observateurs du marigot politique ivoirien estiment que le scrutin ne sera pas équitable. Jusqu’à ce jour, aucune candidature n’a encore été enregistrée. L’idée de se maintenir au pouvoir après 2020 par la violence, au mépris des lois du pays, n’est pas à exclure, car elle a fini par émerger à la surface. En effet, Ouattara a décidé, à l’instar de Mobutu qui avait sa Division spéciale présidentielle (Dsp), Compaoré qui avait son Régiment spécial présidentiel (Rsp) et Nicolae Ceausescu qui avait sa Securitate, de se doter d’une unité à sa propre dévotion : les forces spéciales. Dont les soldats, selon des informations en notre possession, ont été recrutés au sein des ex-combattants. Pour donner une apparence de transparence, un appel à recrutement a été lancé il y a de cela quelques jours. Quelle est donc cette unité d’élite dont les éléments ne sont pas issus des autres corps de l’armée ? Le recours aux milices tribales (Dozo et supplétifs) moyennant quelques miettes de billets de banques, n’est pas à exclure : la recette a fait ses preuves lors de la conquête du pouvoir d’Etat par le Rdr. L’idée de voir partir Ouattara, à l’exception des responsables du Rhdp formant ce qu’il convient d’appeler un « régime vomi » » par la grande majorité des Ivoiriens épris de paix, de démocratie et de justice, est de plus en plus palpable. Elle ne peut être fière de voir le pays sombrer dans la dette, dans une paupérisation effrayante, un tribalisme abject, une insécurité dépassant l’imaginaire. Pour cela elle (majorité) s’apprête à infliger un vote sanction au pouvoir, mais, la partialité de Youssouf Bakayoko constitue un frein à ce projet. En 7 ans de règne, ce qui était jusqu’à là que rumeurs, sans preuves tangibles et irréfragables, a fini par faire surface : Ouattara ne peut ni diriger, ni démocratiser la Côte d’Ivoire, à plus forte raison la conduire à l’émergence à l’horizon 2020.
Aaron KANIE