NOUVELLE ARRESTATION DE L’ACTIVISTE IVOIRIENNE DES DROITS DE L’HOMME PULCHERIE EDITH GBALET: UN NET RECUL DANS LA LIBERTE D’EXPRESSION ET DANS LA PROTECTION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME EN COTE D’IVOIRE : L’OIDH appelle à une action immediate en faveur de sa libération
L’activiste ivoirienne PULCHERIE EDITH GBALET a été arrêtée ( à nouveau) le lundi 22 Août 2022 et incarcérée à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA) ce mardi 23 Août 2022. L’Observatoire Ivoirien des Droits de l’Homme (OIDH) dénonce une arrestation irrégulière au regard de la loi portant promotion et protection des défenseurs des droits de l’Homme, une atteinte grave à la liberté d’expression, demande sa libération, et appelle à la mobilisation de tous pour cela.
Suite à un appel qu’elle a reçu du Directeur Général de la Police Nationale (DGPN) prétextant le retrait de son passeport ainsi que de son téléphone portable qui lui avaient été confisqués depuis son retour du Mali le 3 Août 2022 en soirée, Mme Pulchérie Gbalet a été mise aux arrêts à la préfecture de Police d’Abidjan.
Pour rappel, elle avait été déjà interpellée le 3 Août 2022 à son retour de Bamako (Mali), interrogée à la Préfecture de Police d’Abidjan puis relâchée avec son passeport et son téléphone confisqués par les autorités policières.
Les autorités ivoiriennes n’auraient semble-t-il pas vu d’un bon œil le fait qu’elle ait profité d’une invitation d’ONG maliennes au Mali pour s’informer auprès des autorités maliennes sur la situation des 49 militaires ivoiriens arrêtés à l’aéroport internationale Président Modibo KEITA Sénou de Bamako depuis le 10 Juillet 2022 et détenus depuis lors.
Présentée au juge d’instruction du 10e cabinet (Cellule Spéciale d’Enquête) près le tribunal d’Abidjan-Plateau, elle a été inculpée pour les faits de : entente avec les agents d’une puissance étrangère de nature à nuire à la situation diplomatique de la Côte d’Ivoire, Diffusion de fausses nouvelles de nature à attenter au moral des populations, atteinte à l’ordre public sur la base des articles 155, 179 et 183 du code pénal, Elle a été incarcérée à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA) ce mardi 23 Août 2022.
l’OIDH tire la sonnette d’alarme sur la violation manifeste des droits de Pulchérie Gbalet en tant qu’activiste et défenseuse des droits de l’Homme en l’occurrence :
- Le droit à la liberté d’aller et venir,
- Le droit à la liberté d’expression,
- Le droit de communiquer avec des personnes, associations ou organisations gouvernementales, non gouvernementales ou intergouvernementales qui poursuivent les mêmes buts,
- Le droit d’accéder librement aux informations liées aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales et de conserver ces informations,
- Le droit de publier, de communiquer et de diffuser librement des idées et informations sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales,
Ces droits précités sont prévus par les articles 12 et 19 du Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politique (PIDCP) et les articles 3 et 5 de la Loi n°2014-388 du 20 Juin 2014 portant promotion et protection des défenseurs des droits de l’Homme en Côte d’Ivoire.
L’OIDH dénonce aussi et surtout la forme de son arrestation et la perquisition de son domicile qui sont en violation flagrante de la procédure prescrite en la matière par les dispositions de la loi de 2014 susmentionnée portant promotion et protection des défenseurs des droits de l’Homme, précisément en ses article 5 et 6 tel qu’il suit :
Article 5 : « Les défenseurs des droits de l’Homme ne peuvent être poursuivis, recherchés, arrêtés, détenus ou jugés à l’occasion des opinions émises et des rapports publiés dans l’exercice de leurs activités.
Les défenseurs des droits de l’homme ne peuvent, pendant la durée de leurs activités, être poursuivis, recherchés, arrêtés, détenus ou jugés en matière criminelle ou correctionnelle qu’après information du Ministre chargé des Droits de l’Homme, sauf cas de flagrant délit. »
Article 6 : « Les sièges et domiciles des défenseurs des Droits de l’Homme sont inviolables. Il ne peut y être effectué aucune perquisition, ni arrestation sans autorisation expresse du Procureur de la République et après information du Ministre chargé des Droits de l’Homme, sauf cas de flagrant délit »,
Âgée de 50 ans et sociologue de formation, Pulchérie Edith Gbalet est une activiste ivoirienne des droits de l’homme, fondatrice de l’ONG Alternative Côte d’ivoire (ACI). Elle est engagée dans des luttes sociopolitiques pour améliorer la gouvernance, le bien être des populations ivoiriennes et aussi dans la lutte contre les restrictions et atteintes aux libertés fondamentales. En 2017-2018, elle est à l’initiative du mouvement des gilets oranges en vue de protester contre des inégalités sociales défavorables au bas peuple. Déjà en août 2020, elle a été arrêtée et a passé huit mois à la Maison d’arrêt d’Abidjan jusqu’en avril 2021 pour avoir dénoncé et appelé à des manifestations contre la candidature à un 3e mandat électif du Président Ivoirien Alassane Ouattara, jugée contraire à la
Constitution par une bonne partie de l’opinion publique ivoirienne. Dès sa sortie de prison, elle s’est engagée à lutter contre le coût élevé de la vie et plusieurs situations d’inégalités sociales.
Son activisme lui a valu la perte de son emploi sans préavis au sein Bureau National d’Etudes Techniques et de Développement (BNETD), structure sous tutelle de l’Etat ivoirien.
Sa candidature a été proposée en juillet 2022 par plusieurs mouvements d’activistes africains au jury du prix Martin Ennals, du meilleur défenseur des droits de l’homme, édition 2022.
l’OIDH appelle toutes les entités intéressées à se joindre à l’action pour demander à l’Etat de Côte d’Ivoire la libération de Mme Pulcherie Edith Gbalet.
Pour l’OIDH
Le Bureau Exécutif National