CPI : A quoi nous renvoient les demandes conjointes d’un «non-lieu», d’un «acquittement» et d’une «libération immédiate» ?

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Ça y est ! Autorisée, exceptionnellement, par la Cour à introduire une requête, à mi-chemin, à l’effet de soumettre à sa sagacité les moyens étayant la vacuité des charges concoctées par le Procureur, l’équipe de défense du Président Laurent Gbagbo s’est dorénavant libérée depuis le lundi dernier 23 juillet 2018. Il est donc imparti à l’Accusation, incarnée par dame Bensouda, un peu plus d’un mois, pour formuler ses observations aux moyens développés par Me Altit et ses confrères.

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L’audience publique prévue pour le 1er octobre prochain sera donc le théâtre des empoignades argumentaires, entre la confrérie Bensouda et la défense, que nous suivrons en direct.

Il n’apparait, dès lors, d’aucun intérêt de s’éterniser sur la trame des arguments de la défense dont la pertinence ne peut relever que de l’évidence.

En revanche, dans l’intérêt de la facilitation de la compréhension technique de la démarche de la défense, il nous est apparu utile de développer les approches définitionnelles de deux notions juridiques utilisées conjointement dans sa requête par Me Altit, alors même qu’elles semblent viser les mêmes résultats.

Il s’agit, d’une part, de la demande de «non-lieu» (1), et d’autre part, de celle liée à l’«acquittement» (2). Nous nous évertuerons, à la fin, d’esquisser les motivations techniques de la demande portant «mise en liberté immédiate»(3).

Pourquoi, alors que s’il y a un «non-lieu», cela voudra dire que les charges ne tiennent pas, et que le Président Laurent Gbagbo devrait être aussitôt libéré, la défense exprime-t-elle encore une autre demande portant «acquittement»?

1- Approche technique du «non-lieu»

En droit interne, c’est-à-dire devant nos juridictions nationales, seuls le juge d’instruction et la Chambre d’accusation (une juridiction d’instruction d’appel) prennent des ordonnances de non-lieu contre un inculpé, ce, au terme de leur information judiciaire.

Alors, pourquoi la défense du Président Laurent Gbagbo demande-t-elle un «non-lieu» pour un procès déjà ouvert depuis le 28 janvier 2016 ?

Mais tout simplement, parce qu’aux termes du Statut de Rome portant Traité de la Cour pénale internationale, tout ce à quoi nous avons assisté du 28 janvier 2016 au 19 janvier dernier (2018) ne s’apparente qu’à une phase d’instruction pure et simple.

Dès lors, en demandant à la Cour de rendre une décision de «non-lieu», la défense conclut, à l’issue de la comparution de ses 82 témoins et de la présentation d’une kyrielle de preuves documentaires par Bensouda, à un manque criant de consistance des charges, ne pouvant valablement justifier la poursuite du procès.

Mais apparaît-il surabondant de s’interroger si le «non-lieu» obtenu ne devrait-il pas suffire à justifier la mise au large automatique du Président Laurent Gbagbo ?

Pourquoi la défense s’est-elle sentie encore en devoir d’introduire une autre demande portant Acquittement ?

2- L’acquittement

S’analysant en une décision de non culpabilité, cet «acquittement» ne sera rien d’autre que la conséquence du «non-lieu» prononcé en amont contre les charges. Une telle décision s’impose d’autant que, même si, au regard de la spécificité organique de la CPI, ce à quoi nous avons assisté depuis le 28 janvier 2016, est mis au compte d’une vraie instruction, il ne faut surtout pas oublier que l’affaire a été bel et bien renvoyée en jugement.

Dès lors, la Cour, en prononçant l’«acquittement», en conséquence du «non-lieu», vide sa saisine en signifiant qu’à son niveau, elle est quitte avec l’affaire Gbagbo Laurent sur laquelle elle ne reviendra plus. Et que, par voie de conséquence, le Président Laurent Gbagbo devrait être libéré, s’il n’est détenu pour autre cause.

Or, sachant que son client n’est pris en otage que «pour permettre à Ouattara de gouverner», et non pour autre motif, la défense, sans désemparer, a bouclé la boucle, en demandant, in fine, «la libération immédiate de leur client».

3-Pourquoi cette dernière demande portant libération immédiate?

Les effets de l’acquittement n’entraînent-ils pas systématiquement «une libération immédiate» ?

Quelle est la vraie motivation de cette dernière demande de la défense ?

Cette demande tend, en effet, à juguler toute éventualité de recours malfaisant, de la part de Bensouda, contre le très probable jugement d’acquittement.

Car, aux termes des dispositions de l’article 81-3-a du Statut de Rome portant Traité de la CPI, on peut être acquitté et être maintenu en détention, en cas d’appel de la décision d’acquittement sur la culpabilité ou la peine, jusqu’à ce que la Chambre d’appel statue à nouveau…

Tchedjougou OUATTARA

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